ISCHIA / L’habit du moine

21 mars 2025

Temps de lecture : 4 minutes

Histoire à lire

Luigi, Forío, 37 ans

Je suis le petit-fils d’un homme du siècle dernier qui a une histoire particulière. Je m’appelle Luigi comme mon grand-père qui était ermite sur le mont Epomeo. Il avait à peine vingt ans lorsqu’il s’est installé dans une petite église dans la montagne. En 1936, il est devenu moine, il vivait de la quête et des offrandes qu’on lui faisait: des pâtes et des haricots pour lui et les autres frères du couvent. Quand la Seconde Guerre Mondiale a éclaté, il est resté seul dans la montagne. Il a alors fait venir une partie de sa famille. Ils dormaient sur de la paille, ils ramassaient des herbes pour en faire de la soupe.

Mon grand-père a gardé son habit de moine même s’il n’y avait plus du tout frères et donc de couvent. C’était en fait un moyen de ne pas être enrôlé et d’échapper à la guerre. Il est descendu de la montagne en 1947 pour revenir dans son port: Forío. L’année suivante il s’est marié avec ma grand-mère. Ensemble, ils ont eu neuf enfants, Mais mon grand-père était amoureux de la montagne. Il ne pouvait pas s’empêcher d’y retourner. Sur le chemin, il y avait cette église en ruines dédiée à Santa Maria del Monte. Les gens l’utilisaient comme une grange. Mon grand-père raconte que la Madone lui est apparu en rêve en lui demandant de réparer sa demeure. Il a alors épousé cette cause, il a fait la quête, à Forío puis dans toute l’île pour récolter l’argent necessaire aux travaux. Avec l’aide de quelques personnes, il a réhabilité cette église. Et ensuite, il n’a plus quitté la montagne. Ma grand-mère est restée à Forío pour le travail. Lui a vécu seul là-haut, comme pendant la Seconde Guerre Mondiale. Il était heureux dans la nature, entouré d’animaux. Il recevait toujours avec plaisir les rares promeneurs qui s’aventuraient dans le coin et il quittait sa montagne seulement une fois par semaine pour faire des courses. C’était un faux moine, mais un vrai ermite.

L’abito dil monaco
Luigi, Forío, 37 ans

Sono il nipote di un uomo vissuto nel secolo scorso che ha una storia tutta particolare. Io sono Luigi, come veniva chiamato mio nonno, che faceva l’eremita sul Monte Epomeo. Aveva appena 20 anni quando ha vissuto in questa chiesetta nella montagna. Verso 1936 ha indossato l’abito dei frati e andava a fare la questua. Andava raccogliendo le offerte, la pasta e fagioli, per il convento e per gli altri. E durante la Seconda Guerra Mondiale rimase da solo e per stare in compagnia si portò lì sopra la sua famiglia. Dormivano sul fieno, raccoglivano le erbe per la minestra.

Mio nonno mantenne l’abito da monaco anche se non c’erano più frati e quindi non c’era più il convento. Per non andare a fare la guerra, ha trovato questo escamotage di indossare il saio durante il periodo della guerra.Poi nel 1947, lasciò il monte Epomeo, per tornare al suo porto: Forío. E nel 1948 sposò mia nonna. Insieme hanno fatto nove figli. Pero diciamo che è rimasto innamorato dalla montagna, andava sempre sopra. Sulla strada c’era una chiesina che è dedicata a Santa Maria del Monte. Era un rudere e la gente la utilizzavano come ricovero per gli animali. Poi dice che se ha sognato la Madonna e la Madonna gli disse di aggiustare la casa sua. Sposò questa causa e incominciò a girare per Forìo, e per l’isola, per racimolare i fondi per aggiustare questa chiesa. Insieme all’aiuto di qualche altra persona, l’hanno sistemata. Poi mio nonno ha vissuto quasi sempre in montagna. Mia nonna lavorava a Forio.

E lui rimase da solo, come prima, durante la guerra. Stava bene, circondato dagli animali ed era l’unica persona che all’epoca stava nella natura. Accoglieva sempre le poche personne che si avventuravano nella zona. Scendeva una volta a settimana per commissioni. Era un finto monaco pero un vero eremita.

Le projet

Les habitants et habitantes du pourtour méditerranéen sont au cœur de l’action de l’association Histoires Vraies de Méditerranée (HVM), depuis sa création en 2015. Le sujet n’est pas la mer, ce sont les hommes sur les rochers qu’il faut entendre, écrit François Beaune en introduction de La lune dans le puits, son premier recueil d’histoires vraies publié aux éditions Verticales en 2013, révisé pour la version Folio en 2017. Qu’en est-il de celles et ceux qui vivent entourés par la mer, sur les îles de Méditerranée ?

Au cœur de la Méditerranée, les populations insulaires continuent, comme par le passé, de jouer un rôle central dans la connaissance et la compréhension de cet espace connecté : Leur vie extérieure, le rôle qu’elles jouent sur le devant de la scène de l’histoire, est d’une ampleur que l’on attendrait pas de mondes au fond si misérables. La grande histoire, en effet, aboutit souvent aux îles, écrit Fernand Braudel dans La Méditerranée et le monde méditerranéen à l’époque de Philippe II [1949].

Dans la lignée des projets portés par l’ONG Initiative pour les petites îles de Méditerranée (PIM) adossée au Conservatoire du littoral, et en partenariat avec le réseau Petites îles de Méditerranée. Histoire et patrimoine de l’Eole française de Rome, l’association HVM se propose de collecter puis de restituer sous diverses formes les histoires vraies des habitants des petites îles de Méditerranée occidentale, acteurs de cette grande Histoire évoquée par Fernand Braudel.

Entre coupure et ouverture, les îles ont nourri bien des imaginaires ; leurs populations ont aussi modelé des paysages, produit des cultures et élaboré des styles de vie qui composent autant de patrimoines singuliers d’une immense richesse humaine et naturelle, souligne Brigitte Marin dans l’introduction de l’ouvrage Les petites îles de Méditerranée occidentale [2021]. Il s’agit – par la collecte, la reconstitution et la restitution d’histoires vraies – d’interroger ces imaginaires, ces récits et ces mémoires afin de faire connaître et de préserver ces patrimoines singuliers.

En partenariat avec les différents programmes pluridisciplinaires conduits par l’Ecole française de Rome ainsi que l’ONG PIM et le Conservatoire du littoral de l’Antiquité à nos jours, le collectif de l’association Histoires Vraies de Méditerranée complètera ce travail de recherche et de documentation en explorant les figures de l’insularité, au travers de la parole et des histoires des gens ordinaires.