Une histoire collectée en mars 2018 à Saumane
Transcription de l’histoire audio
“ C’est une histoire méditerranéenne puisqu’elle se passe en Corse. Ce n’est pas ici mais j’imagine qu’elle aurait pu aussi s’y passer. C’est fin 2004, entre Noël et Nouvel An, je suis avec des amis en Corse, pour un petit passage. On habite chez un berger au-dessus d’Ajaccio et donc un matin très tôt, il tape au carreau pour que j’aille le rejoindre pour faire la traite. Moi, je ne fais rien, je regarde. La traite se passe, il fait froid. On descend avec les deux bidons de lait quelques kilomètres plus loin, à la fromagerie.
Il fait très froid, on allume du feu dans la cheminée et on se raconte nos histoires pendant que le lait, la présure puisse cailler pour faire le fromage. Il m’explique qu’il partage cette fromagerie avec un autre berger, un vieux berger : Jules. Ce Jules n’est pas là ce matin parce qu’il est parti porter son fromage à Ajaccio. À un moment il me dit : « On va retourner les fromages de Jules, ça va l’avancer ». Ils sont sur des claies et tous les jours, même au début peut-être deux fois par jour, on retourne les fromages pour qu’ils s’égouttent. Il me dit : « Je ne sais pas s’il les a salés ». Bon, on les retourne quand même.
En fin de matinée, le lait a fini par prendre. Jules revient d’Ajaccio et, en corse, il lui demande s’il a bien salé ses fromages. Jules prend son fromage et… un grand coup de langue ! Et il dit « oui », puis il repose son fromage.
Et moi je suis absolument émerveillée, ravie, heureuse de ce coup de langue parce que je me dis que toutes les normes européennes n’empêcheront jamais le coup de langue du berger corse ! ”
Françoise